Interopérabilité des systèmes d’informations Transport : Enjeux & Innovations
Nul besoin d’être grand clerc pour prédire, au secteur du transport, de larges disruptions numériques dans les années à venir. Dans les grandes lignes et s’il s’agit d’égrener les technologies « de rupture » (internet des objets et big data en tête), le discours sur la nécessaire transformation numérique du transport fait consensus. Dans le détail, évidemment, l’affaire s’avère plus complexe. Difficile encore d’en anticiper la trajectoire précise et les formes concrètes.
Bien sûr, il en retournera en dernier ressort des postures adoptées par les directions générales et leurs stratégies concurrentielles. On peut déjà pressentir que le slogan importé de la Silicon Valley « the winner takes all » (le gagnant raffle la mise !) n’est certainement pas la meilleure publicité faite au numérique dans un secteur où l’on redoute, avec raison, les phénomènes d’Uberisation.
Et pourtant, la « plateformisation » dans le secteur du transport à beaucoup à apporter pour décloisonner les systèmes d’information, développer les processus collaboratifs et y générer d’importants gains économiques et environnementaux. Pour GS1, co-concepteur avec ses adhérents de standards technologiques internationaux, la bonne transformation sera celle qui saura faire l’économie de ces deux écueils : ni de monopole d’un acteur conditionnant les modèles économiques de tous les autres, et à l’inverse : ni d’atomisation désordonnée d’une multitude d’offres numériques (phénomène de silo). Sur cette base de réflexion, une étude concernant les nouveaux besoins d’interopérabilité des acteurs du transport a été réalisée par GS1 France, Cereza Conseil et le concours de plusieurs acteurs clés : industriels, distributeurs, transporteurs et éditeurs de solutions logicielles.
Des besoins clairs d’interconnexions des systèmes
L’expansion du e-commerce, le développement des échanges multimodaux ou encore de la logistique urbaine mettent les opérations de transport en première ligne des besoins de communication entre les différents systèmes d’informations.
Prenons trois exemples :
- Le développement de la livraison sous 2h après la passation de commande comme on l’observe aujourd’hui chez des e-commerçants ou des acteurs de la grande distribution rend de plus en plus caduques les échanges par « batch journalier » (comme souvent l’EDI).
- La volonté d’offrir un large panel d’offres -visant à développer une Expérience Client forte- (Livraison en point relais, en consigne urbaine, avec rendez-vous, « Click & Collect »…) couplée à des impératifs d’optimisation des coûts nécessitent des interfaces avec des partenaires de plus en plus nombreux mais aussi la mise en œuvre de systèmes d’informations permettant très rapidement d’identifier le meilleur « itinéraire » pour l’exécution de la commande.
- L’absence de maîtrise des échanges d’emballages réutilisables comme « la palette Europe », les bacs plastiques, les « rolls » métalliques,… entre différents acteurs dégrade les performances financières. La capacité à comptabiliser les emballages réutilisables ou encore à valider leur intégrité tout au long de la Supply Chain devient ainsi un enjeu de compétitivité.
Les différents échanges avec des directions Supply Chain et Systèmes d’Informations menés dans le cadre de cette étude, ont permis d’identifier 5 grandes catégories de besoins en interopérabilité dans le Transport (Cf. schéma ci-dessous) :
- L’organisation des opérations de transport,
- Le suivi des ressources,
- Le suivi des marchandises,
- Le suivi des emballages,
- La gestion documentaire.
Parmi ces 5 grandes catégories, plusieurs priorités sont apparues, notamment en termes d’émergence de standards :
- L’optimisation du management des rendez-vous dans une optique d’augmenter l’offre aux clients, de gagner en productivité et de limiter les impacts environnementaux,
- La mise en place d’une codification standardisée des événements de suivi de l’exécution de la prestation de transport ainsi que de la preuve de livraison afin de fluidifier les échanges entre acteurs
- Le développement de standards d’identification des contenants permettant ainsi d’assurer leur maîtrise de bout-en-bout,
La mise en œuvre de standards d’échange de données entre les différents systèmes télématiques notamment dans une optique de meilleur suivi de la sous-traitance.
Voilà pour les challenges à relever ! Heureusement les opportunités ne manquent pas pour projeter les équipes de GS1 sur ces enjeux de transformations. Trois projets en cours l’illustrent parfaitement.
CRC® Services, roi de la traçabilité ?
Le récent « couronnement » (Grand Prix des ROI de la Supply-Chain 2016) de l’initiative CRC® Services a mis en lumière un nouveau principe d’approvisionnement qui porte en lui les germes d’une possible généralisation de la mutualisation et représente en tant que tel un enjeu de tout premier ordre : diminution de 15% des coûts de transport et de 25% de l’impact CO2 ! Mais c’est aussi la possibilité de bâtir à partir de ce modèle une chaîne de « Track&Trace » « sans coutures», combinant des évènements depuis l’expédition des industriels jusqu’à la livraison au destinataire final.
Vers un Doodle de la logistique ?
Sur le terrain des prises de RDV Transport, les équipes de GS1 sont occupés à animer la concertation des acteurs métiers pour fournir un premier niveau d’interconnexion des acteurs sous la forme d’un message EDI standardisé. A terme, il ne fait peu de doute que les agendas numérisés mis en partage par ces outils s’imposeront comme le mode de coordination le plus efficace. Et que des algorithmes pourront préconiser le choix des meilleurs créneaux en fonction de divers critères métiers (risques de retard, combinaison de flux, etc.).
Harmoniser pour mieux Benchmarker
Enfin, après la première mondiale opérée sous l’égide de la FEVAD (Fédération du E-commerce et de la vente à distance) qui a publié en 2015 les premiers chiffres issus de l’observatoire de la logistique du e-commerce, un travail d’harmonisation des données de traçabilité (évènements transport) dans ce secteur représente une étape incontournable pour en étendre la démarche (à d’autres acteurs, d’autres pays, etc.). Faire converger les données et les systèmes de « track&trace » représente par ailleurs un moyen efficace pour mieux combiner les flux transfrontaliers et ceux du dernier kilomètre.
A propos des auteurs :
Nicolas Récapet : Ingénieur diplômé de l’Ecole Polytechnique de Montréal et de l’EPF, certifié CSCP de l’APICS, Executive MBA HEC, Nicolas RECAPET est responsable de l’activité Supply Chain chez Cereza Conseil – Groupe Talan.
Stéphane Cren : Ingénieur diplômé de l’Université Technologique de Troyes. Stéphane CREN est responsable du développement de l’Offre et de l’innovation chez GS1 France.
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